Conventions intra-groupe : attention au risque de nullité et au délai pour l’invoquer

Photo O de PrécigoutOlivier de Précigout
Directeur Associé
FIDAL
Intervenant EFE à la formation « Conventions intra-groupe : maîtrisez les nouveaux risques » les 27 et 28 novembre 2013 à Paris

Pour reprendre la définition d’un grand professeur de droit, une convention intra-groupe est un « accord de volonté destiné à produire un effet de droit » qui, en l’espèce, lie directement ou indirectement des personnes morales appartenant à un même groupe, ou qui les implique, elles-mêmes ou leur dirigeants.

Peu importe la forme de cet accord (qui peut être écrit ou oral) ou son objet dont la pratique nous donne des exemples nombreux : prêt, convention d’intégration fiscale, garantie, abandon de créance, convention de trésorerie, bail, contrat de management, détachement de personnel, transaction commerciale, cession d’actifs, partage de frais, licence de marque, …

Traiter les conventions intra-groupe de manière appropriée impose, notamment, de les appréhender au regard du droit des contrats et, pour certaines formes sociales, du régime dit des « conventions réglementées ».

Une convention intra-groupe est d’abord un contrat. Elle est donc soumise aux conditions générales de validité de ces derniers : capacité des parties, objet certain, cause licite, absence de vice du consentement et de fraude. L’expérience montre, de manière surprenante, que ces conditions ne sont pas toujours remplies.

Outre les conditions générales de validité des contrats, les conventions intra-groupe sont soumises à un régime de contrôle dans les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés par actions ainsi que dans certains organismes à raison de leur objet (organismes d’habitation à loyer modéré par exemple).

Certains types de conventions sont ainsi interdits. C’est le cas des emprunts contractés auprès d’une société, des découverts consentis par celle-ci, ou des cautions ou avals octroyés par elle en garantie d’engagements vis-à-vis de tiers, bénéficiant à des dirigeants ou à des associés personnes physiques.

A l’inverse, d’autres types de conventions sont totalement libres. C’est le cas des conventions portant sur des « opérations courantes » (c’est-à-dire des opérations effectuées par la société dans le cadre de son activité ordinaire) et conclues à des « conditions normales » (sont « normales » les conditions habituellement pratiquées par la société dans ses rapports avec les tiers de manière à ce que l’intéressé n’en tire pas un avantage qu’il n’aurait pas eu s’il avait été un tiers quelconque, compte tenu des conditions en usage pour des conventions semblables dans d’autres sociétés ayant la même activité).

Les conventions intra-groupe qui ne sont ni interdites ni libres peuvent être soumises à une procédure de contrôle préalable ou a posteriori dont les modalités et les conséquences diffèrent d’une forme sociale à une autre.

Il n’existe pas de dérogation particulière pour les conventions intra-groupe, mais l’existence du groupe sera prise en considération pour apprécier l’aspect « courant » d’une opération et le caractère « normal » de ses conditions (voir Étude du comité juridique du CNCC sur les conventions réglementées dans les groupes adoptée par le Conseil national du 5 juillet 1990 – Bulletin CNCC n°79).

La méconnaissance des conditions générales de validité des contrats ou du régime des conventions réglementées peut entraîner la nullité d’une convention intra-groupe.

Les délais pour obtenir une telle annulation sont variables et doivent être précisés comme l’ont fait plusieurs arrêts récents de la Cour de cassation.

Toute action en nullité d’une convention intra-groupe fondée sur le non-respect du régime des conventions réglementées (à condition que celui-ci prévoit que la convention puisse être annulée si elle n’a pas été préalablement autorisée, ce qui n’est pas toujours le cas), sera prescrite dans un délai de trois ans à compter de la date de la convention ou de sa révélation si elle a été dissimulée.

A défaut d’autorisation préalable lorsque celle-ci était requise, une partie à une convention intra-groupe pourra toujours soulever l’exception de nullité, même après l’expiration du délai de prescription triennale, puisque l’exception de nullité est en principe perpétuelle. Mais attention : encore faut-il, comme l’a rappelé la Cour de cassation (Cass. com 15 janvier 2013), que la convention n’ait reçu aucun commencement d’exécution. Si elle a été exécutée, même partiellement, l’exception de nullité ne pourra plus être soulevée.

Enfin, l’action d’un demandeur qui agirait en nullité d’une convention intra-groupe en invoquant non pas le non-respect de la procédure de contrôle prévue par le régime des conventions réglementées, mais une violation des lois et principes régissant la nullité des contrats, ne serait pas soumise à la prescription triennale visée ci-dessus, mais bénéficierait du délai de prescription de droit commun, soit cinq ans (voir Cass. com 3 avril 2013).

 

 

 

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