Le Digital Services Act (DSA) au service d’une protection accrue des consommateurs face aux plateformes numériques

Partant du constat que la directive e-commerce ne répond plus aux enjeux actuels posés par l’essor considérable des plateformes numériques, la Commission européenne a mis en place une stratégie de régulation visant la protection des consommateurs. Ainsi, le Digital Services Act devrait faire son entrée fin 2020 pour régir les plateformes numériques.
Ce texte a pour ambition d’encadrer les géants du numérique et leurs pratiques. Une consultation publique est en cours, à la suite de laquelle la Commission européenne proposera son texte, qui sera ensuite étudié par les Etats-membres et le Parlement européen, avant ratification. Que faut-il en retenir ?

UNE OCCASION DE REVISER UN REGIME A BOUT DE SOUFFLE
Un cadre législatif obsolète face aux enjeux numériques actuels
Le cadre législatif relatif aux services numériques repose depuis près de vingt ans sur la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000 (1), aussi appelée directive e-commerce. Celle-ci n’a subi que peu de modifications depuis. Or, en 2000 la directive e-commerce ne pouvait pas cibler de manière adéquate des acteurs ou même des pratiques qui n’existaient pas encore. En vingt ans, le potentiel du numérique a évolué de manière exponentielle, et cette directive est vite devenue obsolète et inefficace. De nouveaux acteurs sont apparus et les problématiques se multiplient. C’est pourquoi la Commission européenne cherche aujourd’hui à moderniser la législation en vigueur et surtout l’adapter aux nouvelles réalités économiques, juridiques mais aussi technologiques.

Des consultations publiques ciblant les préoccupations des internautes
Pour orienter au mieux le Digital Services Act, la Commission européenne a ouvert une consultation publique. Depuis le 2 juin et jusqu’au 8 septembre 2020, elle recueille les avis des internautes sur la future législation relative aux services numériques. Il s’agit de questions, pour la plupart ouvertes, touchant les problématiques du e-commerce, de la compétitivité, de la responsabilité des plateformes face aux contenus dangereux, qui seront ensuite prises en compte par la Commission européenne dans le développement et la mise au point du texte final. Cette consultation publique vise à élaborer un texte répondant directement aux attentes des internautes et ayant un impact utile pour eux.

UN DIGITAL SERVICES ACT POUR PROTEGER LES CONSOMMATEURS
Premier pilier : une régulation des plateformes numériques
Le Digital Services Act vise à instaurer une régulation de ces plateformes concernant leur pouvoir de marché, mais également leur responsabilité. En effet, ces plateformes numériques font courir des risques accrus aux utilisateurs par l’accès et la diffusion facilités qu’elles permettent de contenus illicites et dangereux. La protection des consommateurs se place au cœur de cette modernisation. Pour cela, la Commission européenne aimerait renforcer une règlementation ex ante des plateformes numériques, c’est-à-dire leur imposer des injonctions comportementales ou structurelles sans devoir constater préalablement un abus.
Enfin, ce texte s’appliquera aux plateformes et aux moteurs de recherche en ligne dont le lieu d’établissement ou de résidence se situe au sein de l’Union européenne, et qui proposent des biens ou des services à des consommateurs également situés au sein de l’Union européenne, quel que soit le lieu d’établissement ou de résidence de ces services et quel que soit par ailleurs le droit applicable. Cela résout donc le problème de l’ancienne directive, qui était que certains acteurs pouvaient échapper à la règlementation européenne. Le Digital Services Act retire aux géants du numérique le bénéfice du principe du pays d’origine.

Deuxième pilier : encourager une concurrence saine et équitable
Ce pilier vise à remédier aux déséquilibres, à la compétitivité, à l’accès et à la portabilité des données. L’idée est de permettre aux entreprises de faire jouer la concurrence entre plateformes, de conserver l’indépendance de leur politique commerciale mais aussi d’interdire les clauses contractuelles restreignant leur mobilité.
Les plateformes numériques vont également se voir imposer de nouvelles obligations concernant l’accès et le traitement des données, mais aussi concernant leurs conditions générales d’utilisation. Ces dernières devront décrire l’accès à toute donnée, qu’elle soit à caractère personnel ou non. De plus, une transmission des données à des tiers doit être signalée, et une possibilité de s’opposer à ce partage de données doit être invocable par les consommateurs. Toutes ces obligations vont dans le sens d’une plus grande transparence pour les utilisateurs.
Enfin, la mise en œuvre de toutes ces obligations doit être confiée à des autorités ayant déjà fait preuve de leur indépendance et de leur expertise, afin d’éviter tout risque d’influence par les géants numériques qui profitaient jusqu’alors de la faible règlementation à leur égard.

 Le Digital Services Act constitue un premier pas plus que nécessaire vers une pratique plus transparente et plus protectrice des utilisateurs dans le domaine des services numériques.

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(1) https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX:32000L0031